« Instabilité constructive », déclarait il y a trois ans Condolezza Rice à propos de la stratégie américaine au moyen orient.
Le moins qu’on puisse dire est que cette stratégie destructrice a parfaitement réussi.
L’Irak, dont l’état a été préalablement détruit, s’enfonce dans une guerre civile d’une ampleur jamais connue dans son histoire,
Le Liban si fragile renoue avec celle des années 1975-90, même si la configuration des deux camps s’est légèrement modifiée .
La Palestine s’enfonce à son tour dans la guerre civile, fait totalement nouveau dans son histoire (*).
Ceci demeure pour l’instant un guerre par pays ( et clientèles) interposés entre l’axe Syro-Iranien (d’ailleurs plus iranien que syrien) et l’axe franco-anglo-américain (ce nouveau monstre diplomatique qui a émergé discrètement dans les jours qui ont suivi l’entrée en guerre des Etats Unis en Irak en mars 2003 sans que personne n’y prenne garde).
Là l’Iran arme, ou en tout cas finance le Hamas, tandis que les USA arment (de moins en moins discrètement) la force 17 du président Mahmoud Abbas.
Au Liban, ce sont les Etats Unis qui poussent au recrutement de sunnites et de druzes dans l’armée du pays, dans la perspective de nouveaux affrontements (voire d’une nouvelle guerre israélienne) avec le Hezbollah.
En Irak, c’est la confusion totale, quand les Etats Unis après avoir donné à l’Iran une profondeur stratégique inespérée en Irak, en donnant le pouvoir aux chiites, veulent à présent y liquider les agents iraniens, comme si les persans n’étaient pas présents en Irak depuis au moins treizes siècles, depuis que les premiers abbassides firent appel à des troupes venues du Khorassan ?
Et que dire de la Somalie, ce nouvel Irak, que viennent de fabriquer les américains en jetant notamment l’Ethiopie chrétienne à l’assaut des tribunaux islamiques somaliens, comme si ceux-ci n’avaient pas d’abord ramené une paix relative, dans un pays mis en coupe règlée par des chefs de guerre sans scrupule.
Le plus pénible dans ce « désastre stratégique », notamment évoqué par le prince Moulay Hicham (le cousin de Mohammed VI) récemment dans le monde diplomatique, c’est aussi cette pusillanimité française, qui si elle s’est miraculeusement distinguée sur la tragédie irakienne, a malheureusement contribué au déclenchement des deux autres.
Stupéfiante l’attitude française au Liban qui en 2002 encore, défendait le droit du Liban à la résistance et qui en vint finalement à signer avec les Etats Unis cette fameuse résolution 1559, comme un blanc sein à Israel, coupant par ailleurs tous les ponts avec l’ex-allié syrien Bachar el Assad, que Chirac couvrit longtemps (jusqu’à la même époque) sous son aile protectrice.
Révoltant le boycott du budget palestinien par l’union européenne depuis l’élection du Hamas, comme si l’Europe n’avait rien appris depuis la tragédie algérienne, dans un contexte ou feu les accords d’oslo ont fini par servir de paravent à une intensification sans précédent de la colonisation israélienne en cisjordanie.
Les libanais et les palestiniens se retrouvent désormais prisonniers de jeux qui les dépassent même si les premiers savent très bien que « la révolution du cèdre » est aussi emmenée par un certain nombre d’anciens criminels de guerre à la solde des puissances protectrices déjà désignées, et véritables acteurs de la nouvelle « déchirure libanaise ». Quand aux seconds, ils auront vu avec stupéfaction une candidate à l’élection présidentielle française approuver à mi-mots la construction du mur en palestine. Alors nous disons clairement : il faut arrêter Georges Bush avant qu’il ne soit trop tard. il faut que la France se ressaisisse, cette France pusillanime, qui a autrefois prétendue être l’amie du monde arabe.
(*) A l’exception de la période 1936-1939 ou la rivalité entre les familles Nashashibi et Husseini attisée par l’occupant britannique conduisit à une série d’affrontements interpalestiniens.
Marseille, le 3 Février 2007
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